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Ce blog n'est pas un livre construit mais un ensemble de touches d'émotions ou de réflexions nées de quelques années de parcours professionnel et amical dans trois pays du Sud essentiellement : Haïti, Congo RDC et le Sénégal. Vos commentaires sont bienvenus autour de ces textes sans prétention. Juste un partage pour aussi faire découvrir de belles histoires au Sud et des moins drôles. Et n'oubliez pas de cliquer sur "plus d'infos" pour voir la suite de chaque billet !

samedi 11 juin 2011

LES FILLES DE SALY

Saly est la station touristique de la Petite Côte au Sénégal. J'y ai vécu quelques années. J'y ai forcément croisé des vies. Certaines jeunes filles sont bien engluées. Cette misère m'a inspiré le poème qui suit.


Filles de Saly
Comme les chauves-souris vous vivez tard la nuit
Riches sur scooters, pauvres sur les charrettes,
Votre clinquant brille dans la poussière du crépuscule.

Vous carburez à la Flag, à la Gazelle,
Le vin ne vous fait plus peur, vous buvez comme les hommes
Et le Gin ou le whisky ajoute à votre torpeur de zombie.

Le rire se fatigue comme vos yeux dégoulinant de mascara
La petite culotte (pas toujours) pointe sous les 15 centimètres
De tissu qui vous serve de jupe.

La voix se fait rauque dans la nuit,
bouches parfumées de Malboro Light ou d’Excellence,
vos habits sentent le joint exceptionnel.

Vous maniez le portable avec dextérité, coupant quand l’homme
du moment est là, rallumant quand vous êtes en manque d’argent
et de pourvoyeur de taxi, de bière, de cigarettes.

Le jour est très court pour vous ! Vous n’entendez plus la prière
du muezzin le matin. On vous appelle en vain pour le repas de midi.
La gueule de bois est votre compagne
Et vos compagnons sont aussi les profiteurs
De ce que vous offrez à bon marché.

Demain sera comme aujourd’hui qui était comme hier,
vous passez plus de temps à l’Etage ou chez Marie,
qu’avec votre famille.

Un livre, vous ne connaissez pas,
l’informatique vous sert à relancer vos chéris
avec l’appui de Western Union
« Allo chéri, tu sais j’ai le baptême de mon neveu » ou
« Maman est malade, il faut que j’aille la voir à Thiès »   
Ces grands-mères qui meurent plusieurs fois.

Faut dire que vous avez beaucoup de grands-mères,
famille élargie, plus les frasques du papa qui vous
laisse pour retrouver sa femme, mais pas votre mère.


2 commentaires:

  1. Bernard, comme je voudrais te revoir et reparler de ceci. Tu ne te rappelle surement plus: notre unique sortie dans un club de Bwiza : tu m'as lance: " tu m'as emmene dans un lieu de perdition". Ces mots resonnent encore du fond de moi aujourdhui plus qu'il hier.
    Je crois que l'"economie" des nuits n'a pas encore ete exploitee...ces echanges la, ces filles la qui nourissent leurs familles et financent leurs etudes comme les belles de nuit de Nairobi University...etudiantes le jour. Comme a Kinshasa et ailleurs...

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  2. Anonyme ! pour le coup tu l'es bien : je ne me souviens plus de l'histoire... ni de qui tu es ! Tu peux écrire en privé sur mon mail (btaillefer@gmail.com).
    Sur le plan de l'économie des nuits, tu as bien raison ! Il y a beaucoup à dire. Certaines filles, étudiantes le jour sont effectivement travailleuses de nuit. Des filles paumées venues de la campagne à la ville, sans boulot, se prostituent pour nourrir la famille restées au village. Mais au bout d'un certain temps, des habitudes se prennent : on oublie la famille, on laisse les études et on devient ce que je raconte dans ce poème ! Il y a aussi de vraies formes d'exploitation. Je me souviens d'être parti en courant en 2001 d'une boîte de nuit de Tana à Madagascar. Une scène ronde, des filles de 15 ans qui se trémoussaient, très légèrement vêtues et autour des cheveux blancs comme moi. J'ai repense au film "on achève bien les chevaux !" et suis parti en courant après 10 minutes de cette horreur sociétale !

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