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Ce blog n'est pas un livre construit mais un ensemble de touches d'émotions ou de réflexions nées de quelques années de parcours professionnel et amical dans trois pays du Sud essentiellement : Haïti, Congo RDC et le Sénégal. Vos commentaires sont bienvenus autour de ces textes sans prétention. Juste un partage pour aussi faire découvrir de belles histoires au Sud et des moins drôles. Et n'oubliez pas de cliquer sur "plus d'infos" pour voir la suite de chaque billet !

lundi 25 juin 2012

POLLUTION TUEUSE : LES PESTICIDES DÉTRUISENT LA PLANÈTE ET LES HOMMES.


Ce billet porte sur les pesticides utilisés à l'échelle de la planète. Je mets sous le terme pesticides les pesticides, les insecticides, tous ces produits se terminant par "cides" et utilisés dans l'agriculture. Ces produits descendent tout droit des armes chimiques utilisées pendant les dernières guerres. Je n'aurais peut être pas écrit ce message si je n'avais pas lu le magnifique livre de Marie-Monique Robin, Notre poison quotidien. Cet ouvrage, sur lequel je ferai une recension dans un autre billet, se lit comme un roman policier tout en étant une thèse très documentée, riche en références scientifiques. Son défaut est peut-être de s'intéresser plus aux problèmes vécus dans le Nord, encore que l'auteur sait voyager au Chili pour rencontrer des femmes, travailleuses saisonnières, gravement brûlées par les produits chimiques utilisés dans l'agriculture. Je commence mon propos par des chiffres généraux, j'enchaîne sur des faits observés en Afrique puis reviendrai sur ce qui se passe en France.

J'ai un peu menti dans l'introduction. Cette question des pesticides me préoccupe depuis des années. Aux temps, heureux, où j'avais jardin et maison, j'avais plaisir à ne pas mettre de produits chimiques ; une fois, j'ai pulvérisé du Round Up, de Monsanto, intoxiqué que j'étais par la communication "écolo" de l'industriel, à défaut d'être intoxiqué par le produit puisque je n'en ai pas mis beaucoup. Pour tout dire, j'ai une vraie tendance verte et bio depuis des années.


QUELQUES CHIFFRES
Selon le site Goodplanet.info (voir "Pour en savoir plus"), la consommation mondiale de pesticides est en augmentation constante depuis les années 40, passant de 0,49 kg/ha en 1961 à 2 kg/ha en 2004. Le marché mondial représenterait 30 milliards de dollars annuels (24 milliards d'euros) et causerait des maladies graves à 200 000 personnes par an selon l'OMS.
20% de la surface totale des Etats-Unis, 35% de celle de la France, sont soumis à des traitements. Le site Goodplanet.info donne cette carte de la consommation mondiale. De manière inquiétante pour les populations qui y vivent, ce sont des pays comme le Costa Rica, la Colombie, Bélize, la Corée du Sud et le Japon qui ont la plus grosse consommation calculée en kilos par hectare.


Consommation mondiale de pesticides (source Goodplanet.info)
FAITS D'AFRIQUE SUR LES PESTICIDES
Au Sénégal, je fus conduit à m'intéresser de manière plus professionnelle à la question des pesticides. A plusieurs, nous nous sommes rassemblés dans le groupe JAPPOO ("Solidarité" en wolof) afin de donner des débouchés rentables pour les paysans en créant des restaurants solidaires et une boutique de commercialisation des produits maraîchers et fruitiers (Cette affaire n'a pas marché mais c'est une autre histoire dont je parlerai tôt ou tard). 
Un choix était fait : privilégier les produits bio. Mais, comme les agriculteurs strictement bio étaient rares (donc insuffisants pour alimenter des lieux de consommation) et puisque bien des agriculteurs du réseau (à soutenir) étaient "conventionnels", il fallait toutefois savoir si les produits commercialisés ne portaient pas atteinte à la santé publique.
En 2007, je dialogue avec un paysan sénégalais du réseau, que j'appellerai Abdou. Il est fier de montrer les aubergines qu'il a produites :


Je lui demande ce qu'il a utilisé comme pesticides ou insecticides. Sans gêne, il me dit : "du diméthoate et du métafos. C'est le vendeur libanais qui m'a suggéré d'essayer cela". Je découvre sur Internet que le métafos est un pesticide pour le coton. Les deux produits sont interdits par l'OMS. Il s'avère impossible de commercialiser les aubergines d'Abdou. La recherche sur les produits utilisés continue sur les autres périmètres grâce à des stagiaires de l'école d'ingénieurs de Purpan. Charles écrit sur le périmètre de Fissel : l'un des producteurs utilise du Dursban; un autre du Métafos, du Diméthoate, du Décis, du Dicofol, et du Tamaron. Le troisième a mis sur ses produits maraîchers le Diméthoate, le Décis, et le Dicofol etc. Le rapport 2010 de PAN - AFRIQUE confirme, dans une étude sur la zone des Niayes au Sénégal : "Dix pesticides ont €été€ identifi€és ; il s’agit de neuf insecticides : Dimethoate, Metaphos, Carbofuran, Malathion, Endosulfan, Deltamethrine, Chlorpyrifos, Fenitrothion et Methomyl et d’un fongicide, le Man‚èbe". Je fais une vérification sur le site http://e-phy.agriculture.gouv.fr/ qui indique les pesticides autorisés ou retirés. Ce rapport désigne les matières actives dans des pesticides qui ont d'autres noms commerciaux. Toutes ces matières actives sont interdites à la vente en France. Le Dursban y est interdit sous certaines formulations et modes de commercialisation mais pas tous. Nous y reviendrons.
La messe est dite : les produits chimiques les plus nocifs ont envahi le Sénégal : recyclage des produits interdits en Europe ? Produits utilisés par des paysans analphabètes le plus souvent, qui n'utilisent pas de gants, de tenues de protection, de masques. Victimes toutes désignées de leur propre activité économique pour nourrir leur famille.
Il y a des explications à cela : il y a quelques années, des moniteurs agricoles conseillaient les paysans. Puis la Banque Mondiale est passée, avec ses ajustements structurels, chassant cette dépense "inutile" que pouvaient être les moniteurs agricoles et libéralisant toute forme de commerce... dont celui des pesticides. Non conseillés, non informés, des risques, des précautions, des délais de rémanence, les paysans se retrouvent dépendant de commerçants généralistes qui n'en savent pas plus qu'eux sur les risques des produits chimiques. Ils vendent : point barre ! Parfois, comme pour les médicaments, des vendeurs ambulants ou des étals sur les marchés commercialisent des pesticides de contrebande, souvent dans des emballages qui cachent la nature et l'origine. 

Pulvérisation à Keur Moussa au Sénégal, sans protection sérieuse. photo Bernard Taillefer
Fissel est une zone très limitée mais proche de la région des Niayes, cet immense jardin maraîcher de Dakar où travaillent des milliers de paysans, tous utilisant une chimie destructrice de l'environnement et des hommes. Il est vraisemblable que nous ne saurons rien du devenir  médical de ces paysans. Abdou a des chances de s'en sortir puisque, depuis peu, il s'est converti à l'agriculture biologique suite un programme de formation mis en oeuvre par Agrisud et Jappoo développement avec comme formateurs l'équipe de la ferme école agro biologique de Jardins d'Afrique. 
Une enquête de 2012 sur les pesticides au Ghana, indique que sept pesticides prohibés ou à usage limité semblent être encore en usage au Ghana et le gouvernement tarde à réagir malgré le fait que "de nombreuses études académiques ont révélé des niveaux alarmants d'empoisonnement' au niveau des agriculteurs et du grand public" (Pana 20/04/2012).
Interpellé sur la question des pesticides en Afrique, Dr Mohamed Garba, chargé des pesticides à la FAO, a déclaré en octobre 2010 que "l’utilisation des pesticides est l’un des plus grands problèmes qui se pose en Afrique, en termes de santé publique. Des produits chimiques sont souvent radiés des pays développés et se retrouvent dans les pays africains. La situation est liée à l’absence de législation en matière de contrôle des pesticides dans nos pays. Si elle existe, elle n’est pas appliquée. Malheureusement, tous ces produits chimiques se retrouvent chez les petits producteurs. Et dans nos pays, ces produits sont reconditionnés"(1). 
La vente ambulante de pesticides touche tous les secteurs. J'en ai eu un exemple dans le secteur de la pêche. A Joal au Sénégal, sur le site de Khelkom, je surprends une femme en train de mettre de la poudre sur les poissons en train de sécher en hivernage. Je lui demande ce qu'est cette poudre. Elle me répond :"C'est juste pour chasser les mouches !"
De la poudre de DDT sur des poissons qui partiront dans les assiettes. Photo Bernard Taillefer
Quand j'interroge le responsable des pêches, il confirme mes craintes : "Nous savons que c'est du DDT qui est commercialisé par ces vendeurs ambulants. Mais nous n'avons pas les effectifs pour contrôler ce commerce illégal".
Le problème n'est pas propre au Sénégal. Une étude récente (2) sur le Burkina Faso montre, photos à l'appui, que les vendeurs "officiels" savent introduire dans leurs boutiques des produits de contrebande en provenance du Ghana. Notons au passage que l'atrazine est interdite en France. On trouve aussi sur le marché du Paraquat et de l'endosulfan, substances considérées comme très dangereuses.

ET EN FRANCE ?

La France, avec 4,5 kilos consommés en moyenne par hectare de terre agricole, est loin devant l'Allemagne, la Suisse, l'Italie et l'Espagne. Le problème majeur, et Marie-Monique Robin le montre bien dans "Notre poison quotidien" (3) est que moins de 3% des pesticides atteint les organismes indésirables ciblés, ce qui veut dire que 99,7% des substances actives vont ailleurs. Si vous habitez à côté des champs, vous comprenez ce que cela veut dire !
La liste des pesticides interdits en France s'allonge au fil des années. Mais, pour plusieurs d'entre eux, il a fallu une dizaine d'années avant que l'interdiction ne soit prononcée. Une bonne nouvelle cependant : le Cruiser vient (enfin !) d'être interdit en mai 2012 après avoir été dénoncé pendant des années comme un véritable tueur d'abeilles, si utiles pour la pollinisation des plantes.
L'administration commence à connaître ou plutôt à RECONNAÎTRE les effets des pesticides sur la santé des agriculteurs des pays occidentaux, ce qui ne veut pas dire que des mesures sont prises ! Je me réfère dans les exemples ci-dessous au livre de Marie-Monique Robin repris aussi dans ce film de France 2, un peu long, mais qui donne la chair de poule.

Cette deuxième vidéo confirme la première.
Les paysans victimes des pesticides en France se sont organisés dans une association "Phyto-victimes". Il existe deux types de victimes : ceux qui sont victimes d'intoxications aiguës qui surviennent rapidement et ceux qui sont atteints d'intoxications chroniques qui se déclarent après quelques années. Les maladies provoquées par les pesticides et pour lesquels des preuves sont de plus en plus établies (mais c'est plus difficile à prouver dans le cas des intoxications chroniques) sont : la maladie de Parkinson, essentiellement provoquée par les insecticides organochlorés; le myélome (cancer) ; les tumeurs cérébrales (cancer) ; les cancers des os ; le lymphome non hodgkinien (LNH, cancer). 
Ci-dessous le lien qui permet, sur Dailymotion, de voir l'ensemble des témoignages de ces malades. C'est effarant ! Je livre un des témoignages : 


Denis Camuset, agriculteur, victimes des... par MDRG
Comme l'explique Marie-Monique Robin, ces pesticides font au moins 200 000 morts par an sur la planète. Elle alerte également, dans l'entretien, qui suit sur les dangers des pesticides et insecticides à l'intérieur des maisons alors que, notamment en Afrique, des bombes pulvérisatrices en tout genre sont abondamment utilisées en permanence. Après de longs combats des malades et de leurs associations, le 7 mai 2012, est entré en vigueur en France un décret (n° 2012-665 du 4 mai 2012) qui reconnaît la maladie de Parkinson comme maladie professionnelle et établit explicitement un lien de causalité entre cette pathologie - seconde maladie neurodégénérative en France après Alzheimer - et l'usage des pesticides.


D'aucuns pourraient dire que c'est la faute des agriculteurs qui se protègent mal ! Mais ces détracteurs ont-ils travaillé en plein cagnard sur un tracteur non climatisé (oui, cela existe encore !). Le plus grave - Marie-Monique Robin le dit mais aussi de nombreux scientifiques également - est que les combinaisons de sécurité ne protègent pas ! Dans un article intitulé "Les agriculteurs sont mal protégés contre les pesticides" (4) le site Futura Sciences confirme cette thèse à partir d'un article de 2007 de Alain Garrigou et Isabelle Baldi de l'université de Bordeaux qui nous livrent le graphique suivant :
La protection avec combinaison est meilleure dans la phase de préparation des produits. De fait, le problème est que le produit s'infiltre entre autres au travers des coutures des combinaisons.
A PROPOS DES MULTINATIONALES
Depuis plusieurs années, elles (AVENTIS, MONSANTO, BAYER, BASF, DOW CHEMICAL, UNION CARBIDE...) se battent pour éviter que leurs produits puissent être considérés comme générateurs de maladies professionnelles graves. Mais de fait, elles bénéficient largement de complicités en amont dans le corps scientifique et dans l'administration, ce que démontre admirablement Marie-Monique Robin dans le livre cité mais aussi dans son précédent ouvrage "Le Monde selon MONSANTO" : complicités au moment de l'autorisation de mise en marché, complicités dans la fixation des seuils de tolérance aux produits... Marie-Monique Robin explique que "les politiques ont laissé les industriels dicter leur loi, qui consiste à "exiger qu'on prouve la toxicité de leurs produits avant toute réglementation, ce qui revient à appliquer le principe du droit pénal aux substances, présumées innocentes tant que leur culpabilité n'a pas été prouvée""(4).
Dans leurs stratégies, les multinationales savent "acheter" les décideurs (hommes politiques, médecins, responsables de coopératives etc.) en les invitant dans des voyages mirifiques susceptibles d'influencer leurs jugements. Cette stratégie vaut autant pour la diffusion des OGM que pour le commerce effarant de leurs pesticides.
Les multinationales aiment travailler la sémantique des mots et ont su faire évoluer le langage commun : les pesticides sont devenus des produits phytosanitaires puis (le comble !) des produits phytopharmaceutiques ! Alors que ces produits donnent la mort ! Nous sommes en plein cauchemar ! En France, l'agence nationale de sécurité sanitaire écrit très sérieusement sous la question "Que sont les produits phytopharmaceutiques ?" (elle a bien retenu la leçon sémantique) : « Les produits phytopharmaceutiques sont des préparations destinées à protéger les végétaux et les produits de culture. Ils font partie des pesticides, qui regroupent également les biocides et les antiparasitaires à usage humain et vétérinaire ». Comment peut-on écrire qu'ils font partie des pesticides alors qu'ils sont les pesticides ?
Il y a de vraies complicités entre les administrations publiques et les multinationales. Le gouvernement français dispose d'un site d'information intitulé http://e-phy.agriculture.gouv.fr/. Je l'ai fréquenté pendant une journée ! J'y ai appris que les produits utilisés dans le maraîchage au Sénégal sont interdits en France, certains depuis de nombreuses années. J'ai constaté que le site est bien fait puisqu'il présente les produits par leurs noms mais aussi les matières actives en désignant ceux et celles qui sont interdits et ceux qui ne le sont pas. Site bien fait pour un intellectuel, pas pour un agriculteur, surtout s'il est du Sud et n'a pas eu la chance de faire des études secondaires. On ne peut s'empêcher d'émettre quelques critiques :
  1. Il reprend le terme insupportable de "produits phytopharmaceutiques" !
  2. Certains produits, manifestement dangereux, restent autorisés. Je donnerai   l'exemple du DURSBAN 4 : pourquoi ce produit n'est-il pas interdit alors qu'il comprend la même matière active que d'autres produits de même nom qui sont interdits ? Comment maintenir un tel produit vu les commentaires que le site donne  (cf. ci-contre !)

Commentaire du site e-phyto sur le DURSBAN 4

Les actions des multinationales, destructrices de la terre et des hommes, ne s'arrêtent pas là. Elles ont pollué Internet avec de multiples sites soi-disant en faveur de l'environnement. En France, une Union des Industries de la protection des plantes (UIPP) est une véritable arme de propagande qui essaie d'aller dans le sens du vent environnemental. Elle vient de publier un document intitulé « Les démarches de progrès de l’UIPP et des adhérents » dont elle justifie ainsi le sens : « A travers ce document, l'UIPP souhaite témoigner de son engagement pour une utilisation responsable de ses produits, respectueuse de l'Homme, de l'environnement et de la biodiversité » (Excusez du peu !). De tels sites manient la perversité intellectuelle avec beaucoup de maîtrise. L'UIPP a un site appendice : http://www.info-pesticides.org/ . Que du poison mental ! Le site du FARRE (Forum de l'agriculture raisonnée respectueuse de l'environnement) est du même acabit... pour brouiller les pistes et les réflexions.


Signalons enfin une grande opacité dans la composition des pesticides : les pesticides sont vendus sous des noms commerciaux qui ne sont pas nécessairement utilisés pour définir les produits dangereux. Les organismes sélectionnés se contentent souvent de définir les substances actives dangereuses, ce qui suppose de bien lire ce que contient le Metaphos par exemple ! Mais le Metaphos n'apparaît pas comme tel dans les listes de produits interdits que j'ai pu consulter. Par ailleurs, les pesticides comprennent de nombreux autres produits dangereux comme le benzène par exemple. Ces produits ne sont pas systématiquement indiqués sur les étiquettes des produits. Comment un paysan peut-il s'y retrouver ?


RETOUR SUR L'AFRIQUE
Dans certaines zones, notamment celles de maraîchage à proximité des grandes villes, la situation sanitaire est souvent grave. La règle est de produire à tout prix, y compris en abusant des pesticides, sans respecter les délais de rémanence, par ailleurs ignorés. D'autant que les commerçants ambulants (qui achètent bord champs) ou les coxeurs (acheteurs en gros sur les marchés) sont de redoutables requins, spéculant sur le fait que si les paysans ne vendent pas, ils savent qu'ils perdent beaucoup ! Donc, pour les spéculateurs, tirer les prix offerts aux paysans vers le bas est facile et n'incite pas les paysans à avoir des comportements éthiques.
J'ai trouvé, par hasard et sur Internet, une liste autorisée des pesticides par le comité sahélien des pesticides (CSP) dans un document daté de février 2012 et publié par la Banque Mondiale et le Conseil Ouest et Centre Africain pour la Recherche et le Développement Agricoles (CORAF) mais la liste des pesticides autorisés qu'il inclue n'est pas actualisée puisqu'elle date de janvier 2009 (alors qu'il existe une liste daté de mai 2011) ! Cette liste comprend un nombre significatif de pesticides comprenant des matières actives interdites en France (AMETRYNE, CYCLOHEXIMIDE, DELTAMETHRINE, diuron, FLUBENDIAMIDE, FLUOMETURON, HALOXYFOP-METHYLPROFENOPHOSPROMÉTRYNE, TRALOMÉTHRINE, TRIAZOPHOS,   TRIFLOXYSULFURON,  THIOBENCARBE, THIODICARBE).

Il semble qu'on assiste en Afrique aux même relations ambiguës entre l'administration et les firmes multinationales. On peut prendre comme exemple l'endosulfan, une matière active très dangereuse, retirée puis réintroduite quelques années plus tard, dans la culture du coton notamment, alors que les dégâts de ce produit sont connus.
Les organisations paysannes doivent s'attaquer avec énergie à ce problème, ce qui ne se fait pas suffisamment. J'entends, réfugié derrière mon clavier, leurs objections amicales : "Bernard, ce n'est pas un problème majeur ! Nous ne consommons pas des pesticides comme vous ! ". Pas si sûr. Des cultures dominantes en Afrique de l'Ouest, comme le coton ou le riz, la tomate mais aussi le café, le cacao, les ananas, les bananes sont copieusement arrosées de pesticides de nature suspecte ! La petite agriculture familiale, centrée sur les cultures vivrières, est moins touchée pour la simple raison que les paysans connaissent la vulnérabilité de l'agriculture pluviale et ne peuvent trouver les financements qui leur permettront d'acheter des intrants. Mais de plus en plus de paysans, y compris en zone de cultures vivrières, se lancent dans les cultures de contre saison, notamment le maraîchage. Sous l'influence des zones de grande production (les Niayes par exemple au Sénégal) ils en reproduisent les itinéraires de production, avec pesticides ! On peut donc très bien avoir en Afrique et très rapidement, des champs familiaux pollués (avec incidence sur le puits), des familles polluées (bonjour les dégâts sur les enfants !), des écosystèmes pollués.
Le vrai problème n'est pas la statistique nationale mais le fait que dans certaines filières, dans certains écosystèmes, dans certaines exploitations familiales, les pesticides font leurs ravages, se répandant chez les voisins et dans les assiettes des consommateurs.

DU CÔTE DES LUTTES
Il est difficile de faire état de cette mobilisation de plus en plus grande à l'échelle mondiale d'autant que la presse ne rend pas toujours compte des luttes menées dans les campagnes africaines ou latino-américaines.
La mobilisation prend deux directions : l'une, ouvertement contre les pesticides ; l'autre pour une promotion radicale d'une agriculture biologique.
Dans l'action anti-pesticides, il y a en Afrique le réseau PAN-AFRIQUE. Au Sénégal, plusieurs organisations luttent contre les pesticides. A la conférence Rio+20, les organisations paysannes, sous la conduite du grand réseau paysan international, VIA CAMPESINA, se sont invitées pour dénoncer l'utilisation des produits chimiques en agriculture. Jardins d'Afrique donne la preuve que produire bio est possible ! Au Bénin, Manuele Tamó, Représentant pour l'Institut international d'agriculture tropicale au Bénin plaide pour le développement des bio pesticides. 

En France, le mouvement en faveur du bio est de plus en plus fort : AMAP, introduction des aliments bio dans les cantines scolaires, suppression de l'utilisation des pesticides dans les espaces verts etc. tandis que les organisations se mobilisent autour des malades pour dénoncer les pesticides. Les apiculteurs ont lutté pour faire interdire le Cruiser et ont fini par obtenir satisfaction. De telles actions pourraient être menées dans les pays du Sud.


CONCLUSION
Il devient urgent de se débarrasser de ces produits très dangereux pour la planète et pour  la vie. Il est deux façons de procéder : la première est de lutter contre les multinationales en faisant en sorte que les administrations publiques édictent des lois de plus en plus drastiques contre les produits destructeurs, en soutenant le combat de ceux qui souffrent dans leur chair (voir phyto-victimes), en renforçant ou en créant des associations de lutte contre ces pesticides : en la matière les pays du Sud ont des progrès à faire.
Le combat contre les multinationales n'est pas simple du tout. Il n'est pas facile de s'y retrouver entre les noms des pesticides (qui en eux-mêmes ne disent souvent rien mais qui sont connus du grand public) et les matières actives (TRES DANGEREUSES) qu'ils contiennent, peu connues du grand public. Au-delà des matières actives dangereuses, il faut aussi s'interroger sur tous les adjuvants qui entrent dans la composition des pesticides (par exemple le benzène), eux-mêmes très nocifs. Il faut dire avec force que les soi-disant équipements de sécurité ne protègent pas nécessairement les travailleurs agricoles et que de toutes façons les pesticides ne sont pas scotchés aux champs pour lesquels ils sont destinés. Les voisins en profitent ; le ventre de tous les consommateurs aussi !

BON APPETIT !
POUR EN SAVOIR PLUS :
Les pesticides une pollution planétaire
http://www.notre-planete.info/ecologie/alimentation/pesticides_0.php
Liste des pesticides interdits ou autorisés
http://e-phy.agriculture.gouv.fr/
http://www.abhatoo.net.ma/index.php/fre/content/download/14128/243388/file/liste_pesticides_interdits.pdf
Le blog de Marie-Monique Robin
http://robin.blog.arte.tv/
Témoignages de victimes des pesticides
http://www.dailymotion.com/video/xiikvp_benoit-tornier-agriculteur-a-la-retraite-victimes-des-pesticides_news?ralg=meta2-only#from=embediframe-playreloff-4
http://www.victimes-pesticides.fr/victime-pesticides-particuliers.html
Site de la FAO sur les pesticides
http://www.fao.org/agriculture/crops/themes-principaux/theme/pests/fr/
Actions menées
En France
Phyto-victimes : association des victimes des pesticides
http://www.phyto-victimes.fr/
Le Mouvement pour le Droit et le Respect des générations Futures
http://www.mdrgf.org/217actionpestos.html
Le réseau national des AMAP
http://www.reseau-amap.org/
Protection des utilisateurs de pesticides
http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/homme/d/les-agriculteurs-sont-mal-proteges-contre-les-pesticides_19817/

En Afrique
Le réseau PAN- AFRIQUE (Pesticides Action Network)
http://pan-afrique.org/index.php?lang=fr
Plaidoyer pour les biopesticides en Afrique
http://www.scidev.net/fr/agriculture-and-environment/opinions/les-agriculteurs-africains-doivent-passer-aux-biopesticides.html
Une association au Sénégal : "agir pour les générations futures"
http://ujdt2004.solidairesdumonde.org/tag/semaine%20des%20alternatives%20aux%20pesticides%20en%20afrique
Un excellent site d'information sur l'environnement (avec données sur les pesticides)
http://www.goodplanet.info/Accueil2/(theme)//(fiche)/0/(code)6#
BIBLIOGRAPHIE
Marie-Monique ROBIN, Notre poison quotidien, 2011, Editions La découverte /Arte Editions, 478 pages
Fabrice NICOLINO, François VEILLERETTE, Pesticides, révélations sur un scandale français, Fayard, 2007.
Marc DUFUMIER, "Famine au Sud, Malbouffe au Nord : comment le bio peut nous sauver
NOTES
(1) REUSSIR- L’utilisation des pesticides, l’un des plus grands problèmes de santé publique, selon un expert de la FAO, Publié le 5 novembre 2010
(2) SECRETARIAT DE LA CONVENTION DE ROTTERDAM,  Étude pilote des intoxications dues aux pesticides agricoles au Burkina Faso, septembre 2010, 94 pages.
(3) Voir page 115
(4) http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/homme/d/les-agriculteurs-sont-mal-proteges-contre-les-pesticides_19817/
(4) MM Robin cite Geneviève Barbier et Armand Farrachi, auteurs de la société cancérigène.





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